Prédication sur le thème de l'identité
Livre de la Genèse 17:1à5 et Evangile selon St Jean 8: 48à59
OUWAHOU !!!! Ce texte est d'une rare violence !!! Les Pharisiens d'un côté et Jésus de l'autre.
Jésus, un inconnu enseignant dans un Temple !!! Les Pharisiens ne le supportent pas ! D'où cette bataille rangée verbale, mais violente. Verbale tout au moins au début car ce chapitre finit tout de même par une lapidation à laquelle Jésus échappera. Encore une fois.
Tout d'abord au verset 41, un peu avant le passage qui nous concerne (mais c'est important de le prendre en compte), les Pharisiens n'ont pas peur de dire à Jésus : « Nous ne sommes pas nés de la prostitution ! Nous n'avons qu'un seul Père, c'est Dieu », faisant certainement allusion au fait que Jésus est né de père « inconnu » ...
Ce à quoi Jésus à son tour répond : « Vous, vous êtes du diable, c'est lui votre père, et vous cherchez à réaliser les convoitises de votre père. »
Bref, ce chapitre est dur. Dur dans les mots mais dur aussi dans l'interprétation, car il se termine par cette phrase de Jésus : « Avant qu'Abraham fut, moi JE SUIS. » Avec un JE SUIS en majuscules. C'est une énigme ce JE SUIS et d'ailleurs même les Pharisiens ne peuvent pas en comprendre le sens. Un JE SUIS un peu métaphysique peut-être ... Ne l'étant pas moi-même, j'ai cherché ce qu'en disent nos pasteurs et nos prêtres, mais ce que j'ai trouvé était si varié que cela semblait vouloir me dire : Et toi qu'en penses-tu ? Fais-toi ta propre opinion ! Lourde épreuve, mais comme rien n'est impossible à Dieu, je considère qu'il m'a guidé et je vous en propose le résultat.
Voici mon opinion :
Vous savez, dans la vie il y a deux questions essentielles: « D'où est-ce que je viens ?» et « Où vais- je ?» Deux questions qui font penser bien des choses et qui font couler l'encre des théologiens et suer le front des scientifiques si on les rapporte à la création du monde et à sa fin. Mais nous oublions parfois de considérer toute la période qui s'écoule entre ces deux extrémités, et ce texte nous y invite peut-être. Aussi rajouterais-je une question aux deux précédentes : « Qui est-ce que je suis? » ou plutôt « Qui est-ce que je veux être ? »
En effet, nous voyons dans ce passage que le débat tourne autour du Père, de la paternité (moi mon Père c'est Abraham, moi c'est Dieu et toi ton père c'est le diable ou encore tu n'as pas de Père, etc …).
Il me semble que ce texte est un vrai traité sur l'identité de l'homme. Mais qu'est-ce que l'identité d'un homme ou d'une femme ? Est-ce que ça se résume à son père, sa mère, ou sa nationalité, ses origines ? Ou bien est-ce quelque chose de plus choisi, de plus conscient, de plus volontaire ?
Vous savez, cette part de liberté que nous offre Dieu et qui nous permet de décider quel homme ou quelle femme nous choisissons d'ETRE et qui nous libère de nos origines. Et c'est peut-être ça la signification de ce JE SUIS majuscule !!!
Dans la lecture de ce passage, au-delà de la violence, ce qui choque le plus c'est cette erreur grammaticale, mais volontaire, du Christ : « Avant qu'Abraham fut, moi JE SUIS. » On devrait dire en bon Français : « Avant qu'Abraham fut, moi j'étais. » Cette erreur nous rappelle évidemment une autre erreur grammaticale volontaire, le « JE SUIS CELUI QUI SUIS » que Dieu dit à Moïse au buisson ardent sur le mont HOREB dans le livre de l'Exode.
Une erreur de temps : opposition entre le passé simple de « Abraham fut » et le présent « JE SUIS » Le Christ veut peut-être nous amener à comprendre que l'erreur que nous faisons, nous, c'est de considérer notre prochain selon son passé, ses origines, son père, sa mère, et non selon ce qu'il EST LUI, EN VERITE, aujourd'hui, au présent. L'homme libre qu'il est devenu.
« Car chaque arbre se connaît à son fruit. » nous dit Luc (6,44). Alors, si c'est à ses fruits qu'on connaît une femme, un homme, ce n'est donc pas par sa semence … Un « être » se connaît au présent et non pas au passé. C'est peut-être aussi cela pardonner ...
Une erreur de temps nous choque dans ce texte parce qu'elle en est peut-être la clé de lecture, de compréhension !
Au-delà de l'existence temporelle d'Abraham (il est né, il a vécu, et il est mort, nous rappelle judicieusement ce texte) il y a l'existence intemporelle de ce par quoi Abraham était habité ! L'Esprit de Dieu, sa parole. Jésus né de l'Esprit Saint est habité tout entier par la parole de Dieu.
« La parole a été faite chair ... » nous dit Jean (1:14). Et si Jésus dit « Abraham a exulté sachant qu'il verrait mon jour, il l'a vu, et il s'est réjoui. », c'est parce que Jésus est l'accomplissement de toute la prophétie et des prophètes, il est la réunion de tous les prophètes et de toute la parole. Alors oui, les prophètes sont présents avec lui et se réjouissent en voyant son jour ! Ce que Jésus incarne tout entier fait de Lui un être intemporel. Jésus se conjugue au présent : JE SUIS.
Il s'agit bien ici d'incarner la parole, de lui donner vie.
Qu'incarnent les Pharisiens ? Certainement pas ce souffle Divin ! C'est ce que leur reproche le Christ : se réclamer d'Abraham mais sans se laisser posséder, habiter par Dieu !
Se laisser habiter, choisir d'incarner tel ou tel, voilà la part de liberté que Dieu nous laisse : celle d'ouvrir sa porte, sa vie, soit à la vérité, soit au mensonge, par exemple.
Comme l'a fait Luther en son temps ! Il s'est laissé habiter par le souffle Divin, même si parfois pour cela il faut tout quitter ! La liberté c'est dur aussi ! Comme ce texte.
Rappelez-vous Abraham (Genèse 12, 1) : « Le Seigneur dit à Abram : « Quitte ton pays, ta parenté et la maison de ton père, et va vers le pays que je te montrerai. »
Rappelez-vous Nicodème : « Ce qui est né de la chair est chair, ce qui est né de l'esprit est esprit » Ce que nous faisons naître de l'esprit, c'est notre part de liberté, c'est notre choix !
L'identité d'un homme ou d'une femme, ce ne sont donc pas ses origines, mais c'est sa singularité, le fait d'être unique !
Mais alors, étant unique, cela engendre une question nouvelle : « Qu'est-ce que je peux faire dans ma vie que personne ne peut faire à ma place ? Ni mon père, ni mon grand- père, mais bien moi ! Posons-nous cette question ! Jésus se l'est certainement posée aussi, « Jésus, fils unique de Dieu ! » et « premier-né de toute la création » nous dit Paul (Corinthiens 1,15) Jésus singulièrement singulier !
Unique, cela implique aussi que nous ne pouvons choisir que pour nous- mêmes, pas pour les autres comme le font les intégristes. Les autres ne peuvent pas choisir pour nous, c'est une part de liberté individuelle mais dont chacun se trouve doté.
Il ne s'agit pas de renier ses parents, ni son pays, ni ses origines ! Surtout pas ! Mais simplement de les considérer comme un point de départ, une étincelle première. Peut-être juste comme le premier mot d'une histoire que nous seuls pouvons écrire à présent. Ce merveilleux « Au commencement ... » du début de la Bible.
En nous donnant la liberté Dieu nous passe un relais en quelque sorte et nous dit : « A vous de jouer maintenant, soyez créateurs comme votre Père ! »
Cette liberté d'agir me fait penser au mouvement Colibris, créé par Pierre RABHI.
Le mouvement Colibris, ce sont des personnes qui bâtissent un peu partout dans le monde des modèles de vie en commun, respectueux de la nature et de l'être humain. Et ce mouvement tire son nom « Colibris » d'une légende amérindienne sur ce petit oiseau : la légende du colibri !
Un jour, dit la légende, il y eut un immense incendie de forêt. Tous les animaux étaient terrifiés, atterrés, et ils observaient le désastre, impuissants. Et au milieu de ce désastre et de cette impuissance générale, il y avait un petit colibri qui s'activait, qui faisait des va-et-vient incessants, allant chercher quelques gouttes d'eau avec son petit bec pour les jeter sur le feu. Après un moment, le tatou énervé par cette agitation complètement dérisoire lui dit : « Colibri, tu n'es pas fou ? Ce n'est pas avec ces gouttes d'eau que tu vas éteindre le feu ! »
Et le colibri répondit : « Je le sais, mais je fais ma part. »
Voilà mon interprétation de ce texte de l'évangile de Jean : nous sommes appelés à faire ce que personne ne peut faire à notre place, à faire notre part ! Avec l'aide de Dieu.
En faisant cela, nous choisissons la manière dont nous voulons vivre, ce que nous voulons incarner. Sachant que personne ne peut vivre ni mourir à notre place, alors acceptons notre singularité et faisons notre part. C'est une façon supplémentaire de rendre grâce à Dieu. Vivons à notre place !
Rappelons-nous ce que Jésus nous dit dans ce même évangile de Jean (14, 1-2) : « Que votre cœur ne se trouble point, croyez en Dieu et croyez en moi. Il y a plusieurs demeures dans la maison de mon Père. »
En effet frères et sœurs, Dieu nous a réservé une place au ciel, mais aussi sur la terre... Identité, unicité, liberté ...
Mais vous savez que la liberté des uns commence où s'arrête celle des autres ! Alors ce texte est à double tranchant, il fonctionne dans les deux sens. C'est-à-dire que nous sommes appelés aussi à considérer les autres comme étant uniques !
En ce moment, les amalgames sont d'actualité, avec le terrorisme notamment. Dans une conversation il est plus facile de se dire chrétien que musulman par exemple ! Tous les musulmans sont catalogués comme terroristes potentiels, les réfugiés aussi bien sûr à cause de leurs origines, de leur race, de leur faciès, et en revanche tous les chrétiens sont considérés comme victimes et pacifiques… Mais tout ça se ne sont que des groupes ! Où sont l'individu et sa liberté ?
Ne nous réclamons pas d'un groupe et n'enfermons pas les autres dans des groupes. C'est ce que font les Pharisiens avec Jésus au verset 48 : « N'avons-nous pas raison de dire que tu es un Samaritain et que tu as un démon. »
Dieu seul qui connaît les cœurs de chacun sait dans quel groupe nous sommes réellement ! Le savons- nous nous mêmes ?
Pour finir, au verset 52 il est écrit « Si quelqu'un garde ma parole, il ne connaîtra jamais la mort. ». Dieu est amour, frères et sœurs, il guide et porte dans les difficultés celui qui médite sa parole. C'est seulement avec l'aide du Seigneur Jésus Christ, l'amour du Père et en communion avec l'Esprit- Saint que nous serons capables de renaître de l'esprit, d'être libres et de rendre sa liberté au prochain !!!
Faisons notre part et rendons grâce, pour la gloire de Dieu.
P.Liandier
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