Prédication sur le thème de la miséricorde - 2 Samuel 12:1,15 et Luc 7:36 à 8:3
Prédication sur le thème de la miséricorde le 12.06.16 – 2ème livre de Samuel 12:1,15 et Luc 7:36 à 8:3.
« J'ai quelque chose à te dire. » Luc 7:40
« Cet homme, c'est toi ! » 2 Samuel 12:7
Voici deux phrases issues de ces deux lectures.
La première, c'est Jésus qui parle au Pharisien Simon, parce qu'il a entendu sa mauvaise pensée envers la femme, et la deuxième, c'est le prophète Nathan, envoyé par Dieu au roi David, pour lui faire prendre conscience de sa faute contre Ourias !
Ce sont deux histoires différentes, issues de deux livres différents et de deux époques différentes.
Pourtant, elles sont complémentaires et se font parfaitement écho parce qu'inspirées par le même auteur : Dieu !
Automatiquement, ces deux phrases deviennent universelles et s'adressent, au-delà de Simon et David, à tous les lecteurs et donc à nous !
« J'ai quelque chose à te dire … cet homme que tu juges durement, c'est toi ! J'ai quelque chose à te dire, cette femme que tu estimes indigne d'aimer Jésus, d'être chrétienne, d'aller au culte, c'est toi ! Etc, etc ...
Ainsi environ 1000 ans séparent ces deux histoires et l'on se rend compte que “le temps ne fait rien à l'affaire” (comme disait la chanson), mais que Dieu doit intervenir constamment pour nous rappeler « les bonnes manières » !
De plus, parce que ces deux récits emploient la forme du dialogue, ils nous montrent combien il est important de s'ouvrir aux autres et de dialoguer avec eux et non pas de se replier sur soi si l'on veut avancer et progresser dans sa propre vie.
En effet, les deux personnages sont parfaitement sympathiques et pleins de bonnes intentions. D'un côté il y a David, une des plus grandes figures de la Bible, auteur de nombreux psaumes, héros vainqueur du géant Goliath, donc défenseur du peuple d'Israël, alors qu'il n'était encore qu'un berger, et de l'autre côté il y a Simon, un des rares pharisiens qui prend la peine d'inviter Jésus dans sa maison pour un repas. Donc, un homme ouvert et curieux de rencontrer ce Jésus soi-disant messie !
Malgré cela, il y a quelque chose qui ne va pas dans leur comportement : ils ne peuvent s'empêcher de juger durement ou même de commettre un meurtre, dans le cas de David.
Ainsi, est-ce que même le meilleur d'entre nous est capable du pire ?
Une chose apparaît flagrante dans ces deux récits : il semble qu’il soit impossible de s'auto-juger. L'homme est comme inconscient de ses erreurs, même les plus monstrueuses !
Luc le médecin en sait quelque-chose. Un médecin, malgré sa formation et ses capacités techniques, sait très bien qu'il est incapable de se diagnostiquer lui-même. Quand il souffre, pour trouver sa maladie et donc le bon traitement, il doit faire appel à un collègue et si possible un collègue qu'il ne connaît pas !
En effet, s'il est difficile de s'auto-juger, mon Dieu qu'il est désagréable de se livrer à l'avis et aux critiques de ceux qui nous sont proches !
Nathan et Jésus le savent. C'est pour cela qu'ils utilisent la technique de la parabole. Ainsi, avec cette technique, ils déplacent le regard de ceux auxquels ils s'adressent, les faisant devenir spectateurs et non plus sujets directement concernés par les critiques.
C'est une méthode redoutable et nous voyons que les deux personnages comprennent tout de suite ce qui cloche dans l'histoire qu'on leur raconte et ils ne tardent pas à faire le rapprochement avec leur propre comportement.
Le processus est en marche et ils sont alors à même de corriger leurs défauts, puisqu'à présent ils en sont conscients.
C'est la même chose pour nous, car au fond nous sommes nous aussi des personnes sympathiques et pleines de bonnes intentions. Nous ne cherchons pas à faire du mal, nous essayons même, le plus souvent, de faire du mieux possible, de faire du bien.
Nous avons des qualités que nous ne connaissons que trop bien et auxquelles nous nous raccrochons et qui nous rassurent. Parfois peut-être, ces qualités nous empêchent de prendre au sérieux nos défauts …
Alors comment faire, comment voir ces défauts en face et devenir meilleurs ?
Qui avons-nous pour nous diagnostiquer ?
Quel prophète va nous raconter une parabole pour nous montrer ce qui cloche chez nous ?
Il y a de quoi se sentir seuls parfois, abandonnés, livrés à nous-mêmes …
Rassurons-nous, Dieu ne nous laisse pas seuls. Il nous entoure de tous côtés, de toutes sortes de manières, il est même en nous, nous disent les écritures !
Jésus nous apprend qu'il faut tendre l'oreille et ouvrir les yeux : Marc 18:8 “Ayant des yeux, ne voyez-vous pas? Ayant des oreilles, n'entendez-vous pas?”
Tendre l'oreille à son entourage, même si c'est pénible et difficile, même si l'on se connaît trop, si l'on connaît trop les défauts de l'autre au point de ne plus voir que ça !
Jésus nous dit de ne pas faire comme Simon le pharisien qui ne voit pas une femme qui aime le Christ, mais une pécheresse qu'il connaît trop bien ! Le jugement de Simon est conditionné comme un réflexe.
Nous-mêmes qui venons au culte, nous sommes parfois comme Simon, nous voyons des gens assis sur des bancs et nous n'avons pas toujours conscience qu'ils aiment le Christ au moins autant que nous, si ce n'est plus ! Nous aimons le Christ d'un amour jaloux et nous n'aimons pas que d'autres, que l'on connaît trop, puissent l'aimer mieux que nous …
Nous ne voyons pas qu'à côté de ceux qu'on juge il y a le Christ !
Ne jugeons pas frères et sœurs !
Jésus nous dit quelques chapitres avant dans Luc : “Amen, je vous le dis : aucun prophète ne trouve un accueil favorable en son pays !”
Cette phrase doit nous faire réfléchir et nous encourager justement à mieux considérer ceux qui nous critiquent dans notre entourage.
Au lieu de penser intérieurement : “Est-ce que tu t'es bien regardé toi qui me critiques ?” Nous devrions plutôt dire : “Est-ce que je t'ai bien regardé, est-ce que j'ai vu le Christ à côté de toi, est-ce que j'ai entendu ce que me dit mon prophète ?”
Cette parole du Christ nous montre aussi, dans un sens théologique plus intime, ce que nous disions tout à l'heure : nous ne sommes pas bon prophète pour nous-mêmes, nous ne pouvons nous auto-juger !
Parfois nous nous remettons en question, c'est vrai, mais ces questions sont toujours choisies. Quand nous prenons la peine d'y répondre, nous connaissons déjà la réponse avant même que la question ne soit posée.
Ce sont des questions de complaisance !
Et si nous laissions Dieu lui-même nous poser les bonnes questions ? Mais attention cela n'a d'intérêt que si l'on prend la peine d'y répondre sincèrement !
Il en existe quelques-unes connues dans la Bible.
La première que Dieu pose à l'homme, à Adam, juste après l'épisode malheureux de la pomme. Genèse 3:9 “Où es-tu ?” Ou encore la question qu'Il pose à Caïn après qu'il ait tué son frère Abel : Gen 4 “Où est ton frère ?”
Dieu sait parfaitement où est Adam ou Abel, ce qu'il veut dire c'est “où en es-tu avec toi-même et avec tes frères ?” Où en sommes-nous, sommes-nous disponibles ? Notre esprit est-il plein au point de ne plus pouvoir supporter l'autre, accueillir l'autre ? Si oui, faisons du vide ou du rangement.
Il y a aussi la première question que Jésus pose aux deux premiers disciples qui le suivent après qu'il ait été baptisé par Jean dans Jean 1:38 “Que cherchez-vous ?” En effet, que cherchons-nous ? Pourquoi suivons-nous le Christ ? Souvent on fait les choses sans savoir pourquoi, dans ce monde agité et en désordre, sans y trouver un sens, on fait les choses parce que les autres les font ainsi !
Enfin il y a cette question que Jésus pose trois fois à Pierre à la fin de l'Evangile de Jean : “M'aimes-tu ?” Pourquoi trois fois cette question ? M'aimes-tu comme trois fois rien, ou m'aimes-tu parce que tu as compris que la relation ce n'est jamais deux, mais trois, car le Christ est entre nous qui nous relie, comme il est entre Simon et la femme pécheresse ? Ou encore, m'aimes-tu comme le Père, le Fils et le Saint-Esprit, comme le début, la fin et tout le chemin que fait un homme pour devenir meilleur?
Voilà quatre questions, mais la Bible en contient des centaines et c'est un loisir très enrichissant que de les chercher et d'y répondre.
Ne jugeons pas frères et soeurs, nous n'en sommes pas capables. Soyons patients comme le Seigneur est patient avec nous.
Soyons miséricordieux chers amis, car au fond ces deux passages de la Bible nous appellent à la miséricorde !
Miseri – cor : avoir le coeur tourné vers la misère, le chagrin, la pauvreté des autres, c'est ce que Dieu fait avec nous ! Reconnaissons notre propre misère et nous serons tendres avec les autres.
Cette qualité si particulière qu'est la miséricorde est pleinement d'actualité cette année. Car bien que protestants, vous savez certainement que le Pape François a inauguré un Jubilé de la miséricorde le 8 décembre 2015 et qu'il se terminera le 20 novembre 2016.
Ce Jubilé trouve sa source dans la loi de Moïse, dans le livre du Lévitique au chapitre 25 versets 10 à 13. Dieu prescrit à Israël, tous les 50 ans, une année de miséricorde, durant laquelle les dettes sont remises, les terres sont rendues à leurs propriétaires et les esclaves sont libérés. Il ne faut pas semer, pas moissonner, mais se contenter de ce que Dieu nous offre dans la nature.
Théologiquement, ce Jubilé se traduit par une année durant laquelle nous sommes appelés à vivre un temps fort de remise en question, de conversion et de prise de conscience sur nos comportements, pour nous amener à nous libérer de ce jugement qui nous rend esclaves les uns des autres et à faire confiance à Dieu.
Quand je dis « Dieu prescrit à Israël », ce n'est pas tout à fait par hasard que j'emploie ce verbe. Car ce Jubilé est une forme d'ordonnance Divine, dont la posologie serait une année de miséricorde toutes les deux générations, comme une piqûre de rappel.
Voilà pourquoi c'est un médecin qui nous accompagne durant cette année dans nos lectures dominicales : Luc.
En effet, Luc est connu pour être l'évangéliste de la miséricorde. De son Evangile émane un parfum (comme celui de la pécheresse) encore plus marqué que les autres pour l'amour du pauvre, de l'étranger, qu'il soit Romain, Samaritain, ou autre.
Ainsi qu'une attention particulière pour la condition de la femme, comme en témoigne ce passage de la pécheresse pardonnée.
Luc le médecin, par son métier, s'intéresse, avant tout, à faire cesser la souffrance. Quel que soit le souffrant !
Jésus, lui-même, se présente comme un médecin dans trois Evangiles en disant : “Ce ne sont pas ceux qui sont bien-portants qui ont besoin de médecin, mais les malades !”
Nous sommes donc tous un peu malades frères et soeurs, tous débiteurs, comme le dit la parabole.
Plus largement, Luc nous montre aujourd'hui, par la pécheresse pardonnée, que chacun de nous est capable d'amour.
Qu'il n'y a pas de peuple élu, car nous sommes tous élus. Il n'y a pas de Pharisiens meilleurs que des païens, il n'y a pas d'hommes supérieurs aux femmes ou inversement.
Il nous demande de nous sentir élus, même si parfois nous avons honte de nous-mêmes, mais aussi de considérer nos frères et nos soeurs comme des élus.
Soyons miséricordieux !
Avec la pécheresse, il nous montre qu'en chacun de nous se trouve un parfum et que nous sommes nous-mêmes un vase d'albâtre, que nous souffrons aux pieds du Christ, dans ses pas et que dans un secret caché (comme la femme placée derrière Jésus), il y a de l'amour qui n'est pas toujours visible pour les autres, mais que Dieu seul connaît !
Amen.
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